Programme de l'écrit 1 de l'agrégation externe d'EPS pour la session 2023

Première épreuve : Activités physiques sportives et artistiques et civilisations

L'éducation physique et sportive et son rapport aux types et aux modalités de pratiques en usage dans la société française de 1918 à nos jours.

- Enjeux, débats et controverses : Irène Popard, Maurice Baquet, Yvonne Surel, Robert Mérand, Annick Davisse, Pierre Parlebas.

- Politiques éducatives et réformes disciplinaires.

- Cultures scientifiques, techniques et professionnelles.

- Les jeunes et les pratiques physiques de loisirs.

 

Commentaires

Si mes ouvrages ne se centrent pas spécifiquement sur le programme de l’agrégation externe, ils peuvent contribuer à préparer ce concours ou, tout au moins, à fournir des pistes d’entrée à approfondir, notamment à partir des bibliographies qu’ils comportent.

Quelques mots sur la 1ère épreuve de ce concours.

 

Remarques concernant la présentation générale de l’épreuve

 

Après un intitulé très général qui indique que l’épreuve d’Ecrit 1 de l’agrégation externe demande de mettre en lien « APSA et civilisations », la présentation du programme peut sembler plus précise mais elle reste en fait extrêmement générale : « L'éducation physique et sportive et son rapport aux types et aux modalités de pratiques en usage dans la société française de 1918 à nos jours ».

 

Ainsi, le programme demande d’analyser avec finesse, d’une part, l’évolution des types et des modalités d'activités physiques dans la société, à partir de multiples approches - historiques, sociales, politiques, économiques… - et, d'autre part, d’étudier l’évolution des liens qu’a entretenu l’EP(S) scolaire avec ces pratiques extra-scolaires (le S d’EPS, que je place volontairement entre parenthèses, n’a pas toujours été présent et est justement au cœur du questionnement du programme). S’il est assez aisé de repérer des grandes tendances qui permettent de mettre en évidence des ruptures dans les choix effectués, porter un regard plus précis s’avère beaucoup plus complexe et nécessite de s’appuyer notamment sur l’analyse du positionnement des différent(e)s acteurs/actrices (concepteurs-trices, politiques, inspecteurs-trices, formateurs-trices, enseignant(e)s…) et des textes officiels (logique d’élaboration, compromis trouvés…). Les débats et controverses portant sur ce sujet ont jalonné l’histoire de l’EP(S), et ils ont été marqués par l’évolution des conjonctures sociétales… Bref, le travail s’annonce important.

 

Remarques sur les orientations thématiques

 

- Enjeux, débats et controverses : Irène Popard, Maurice Baquet, Yvonne Surel, Robert Mérand, Annick Davisse, Pierre Parlebas.

Les notions d’enjeux, de débats et de controverses sont fondamentales. Parler d’« enjeu » n’est pas anodin. Pour mieux le comprendre, on peut se référer à l’analyse réalisée par Jean-Paul Clément dans le premier chapitre du livre Sport et pouvoirs au XXème siècle (PUG, 1994) : s’il y a enjeu, c’est qu’il y a quelque chose en jeu, à gagner ou à perdre, c’est que le jeu est ouvert. « L’enjeu motive l’engagement dans le jeu… il y a lutte pour se l’approprier ». « L’approche en terme d’enjeux » consiste donc à considérer l’éducation physique comme un « champ de concurrence » au sein duquel il faut repérer, au cours des différentes conjonctures qui se sont succédées, « la nature des éléments qui orientent les actions » des différents acteurs et leurs stratégies. Autrement dit, les « définitions de l’éducation physique et de ses contenus sont en permanence l’objet de luttes entre les différents acteurs du champ. L’état actuel (…) de l’éducation physique, y compris au niveau de la nature de ses conflits et débats internes, est l’aboutissement d’une série de choix historiques et non une étape obligée dans un processus de développement univoque, continu, linéaire, logique en somme parce chronologique… Les choix historiques donnent toujours lieu à des conflits et des débats intenses ». Pour chacun des protagonistes, l’enjeu est de réussir à « imposer une direction dominante, d’obtenir le pouvoir sur les actes des autres, d’institutionnaliser cette domination dans des textes officiels ou des productions » afin d’obtenir une légitimité qui peut être pédagogique, théorique, politique et législative, culturelle, économique…

En résumé, l’utilisation des notions d’enjeux, de débats et de controverses conduit à refuser toute analyse simplificatrice (évolution inéluctable, qui fait consensus) et, au contraire, à aborder les différents événements historiques dans toute leur complexité (idée que cela aurait pu se passer autrement, car tout le monde n’était pas d’accord pour que cela évolue comme ça a été le cas, et que rien n’est définitivement figé…). Elle amène à articuler les « débats au sein de l’EPS » avec le sociétal, à travers les différentes conjonctures qui se succèdent (les « enjeux de société »).

Les travaux concernant les acteurs/actrices de l’EP(S) sont extrêmement nombreux… on peut même dire que toutes les recherches s’appuient sur les actions, propos, écrits d’acteurs/actrices, certaines se centrant de manière spécifique sur eux(elles). Et la citation du sujet conduit souvent à partir de la réflexion d’un(e) acteur/actrice (ou groupe d’acteurs/actrices). L’analyse de la trajectoire de cet(te) acteur/actrice, et donc du contexte dans lequel il(elle) agit, doit permettre de préciser ses influences sur l’évolution de l’EP(S).

Dans le livre Histoire de l’Education Physique. Genèse d’une discipline scolaire, j’ai synthétisé la trajectoire des acteurs/actrices les plus influents et, dans le chapitre du Guide méthodologique et thématique portant sur les « innovations », j’envisage la question de la réception de leur message.

 

- Politiques éducatives et réformes disciplinaires.

Les réformes disciplinaires (autrement dit, les réformes concernant la discipline scolaire EP(S)) ne peuvent être comprises qu’en lien avec les politiques éducatives entreprises. Dans un chapitre de mon livre L'Ecrit 1 du CAPEPS. Guide méthodologique et thématique, j’ai résumé cette thématique qui a fait l’objet de nombreux travaux. Si la bibliographie portant sur les politiques éducatives est très abondante, il ne faut jamais perdre de vue que le plus important est le lien à effectuer entre ces politiques et les réformes propres à l’EP(S). Dans quels contextes de politique scolaire ont été entreprises les réformes en EP(S) ? C’est l’analyse de ce lien qui doit être centrale. Les IO de 1923, les textes des années 1960 ou encore les programmes collège de 1985 ou de 2015 ont été publiés dans un contexte de politique scolaire particulier qu’il faut étudier.

 

- Cultures scientifiques, techniques et professionnelles.

Au niveau du contexte sociétal qui évolue depuis 1918, la question de la transformation des cultures scientifiques et techniques est centrale pour comprendre l’EP(S) : les acteurs/actrices évoluant au sein de cette dernière s’approprient à leur façon ces cultures, qui comportent leurs propres convergences et divergences, et les utilisent pour concevoir et légitimer leur culture professionnelle. La formation des enseignants est notamment profondément marquée par ces aspects, qui font l’objet de chapitres spécifiques dans le Guide méthodologique et thématique.

 

- Les jeunes et les pratiques physiques de loisirs.

Cet item renvoie à une thématique très classique mais aussi très large et complexe : l’analyse des pratiques physiques et, me semble-t-il, même si cela n’est pas explicitement mentionné, de leur lien avec l’EPS.

Elle nécessite tout d’abord de s’interroger sur ce qu’on entend par « pratiques physiques », en s’appuyant sur les nombreux travaux des historiens et sociologues portant sur ce sujet. Malgré des désaccords portant notamment sur la question de la définition des termes, tous les auteurs s’accordent sur une progressive massification des pratiques physiques (ce qui ne veut pas dire forcément une démocratisation), qui va de pair avec un processus de complexification / diversification entrainant une difficulté toujours plus grande de les définir. L’item utilise bien le pluriel - les pratiques physiques - pour rendre compte de cette diversité.

Qu’en est-il de l’EPS face à cette diversité ?

Celle-ci provoque de nombreux débats et controverses (notions vraiment incontournables). Quelles sont les pratiques qu’il est possible de considérer comme légitimes et qui méritent d’être enseignées en EPS ? Les auteurs des textes officiels sont amenés à faire des choix qu’il convient de précisément analyser.